Dimanche à 14 heures 57, il sera certainement au même endroit que d’habitude, sa place préférentielle du dimanche après-midi. Au centre du vestiaire, à cœur ouvert, à gorge déployée, il agitera son doigt, signe de sa détermination, et poussera ses frères d’arme à le rejoindre dans les limites du dépassement humain. Sportif, en tout cas, dans ce qu’un rectangle vert, est prêt à accueillir pendant 80 minutes. Depuis qu’il a hérité du capitanat, il mène la danse des discours avec l’autorité du chef de meute. Dimanche à 14 heures 57, Alexandre Gueroult vivra en cas de succès breton, son dernier discours dans le costume du deuxième-ligne, du capitaine, du fier représentant de l’ADN du REC. Son dernier match après 15 ans de services.
Exemplaire
Ce qui est homérique avec l’ascension d’Alexandre Gueroult, c’est que peu de gens auraient misé dessus. Comme aucun observateur n’aurait pu parier sur une telle montée du REC alors que le club n’était pas descendu en Fédérale 3 en 2016, pourtant en position de relégable à l’épilogue de la saison, « sauvé » par la mauvaise santé d’un concurrent, à la faveur des instances. Après tout est allé souvent bien pour le REC et le natif de Rennes portait toujours le numéro 5, parmi les premiers dans la lutte, particulièrement affamé quand le niveau s’élève. Depuis la troisième série régionale qu’il avait survolée avec quelques entraînements de rugby dans les jambes après avoir traumatisé les rings de boxe française jusqu’à la Nationale (22 matchs joués en troisième division en 2022/2023), il n’a jamais faibli. Lors de l’historique montée en Fédérale 1 (2018), sur les terres de Périgueux quand Dordogne rimait avec promotion (2022), à jouer au palet sur le bouclier de champion à Valence d’Agen (2022), aux quatre coins de la Nationale (2023), Alexandre Gueroult était là.
Légendaire
Jusqu’à dimanche soir, tous ces gestes anodins du joueur de rugby deviendront uniques. L’ultime partie de carte, l’ultime descente de bus, l’ultime strap et au crépuscule de la saison de Nationale 2, un ultime plaquage, un mot à l’arbitre, un encouragement à Pierre Algans ou Caleb Aperahama avant la mêlée et puis peut-être un titre. En cas de victoire, il fermera un chapitre qui ressemble plutôt à un ouvrage, relié, à l’encre brillante. Où les mots de félicitations s’accumuleront pour une carrière en Noir et Blanc qui vaut tous les périples.
Interrogé en 2023 au sujet de son lieutenant, Kévin Courties avait soufflé, « il représente le REC, c’est le REC », un hommage mérité pour l’homme de toutes ses batailles. À l’inverse du basket notamment, le rugby ne retire jamais les numéros de maillots de ses légendes. Heureusement dira-t-on, le REC aurait dû dès le mois d’août trouver un substitut au numéro 5.
Focalisé sur la finale, le deuxième-ligne s’est confié.
Dans quel état d’esprit es-tu ? Difficile de faire abstraction de ce potentiel dernier match ?
Honnêtement, je suis totalement concentré sur le match. Je ne réaliserai qu’après. Je profite de tous les moments et je suis déterminé, comme tous les acteurs, à gagner cette finale particulièrement importante.
Tu as vécu de bout en bout cette progression de l’équipe fanion du REC depuis la Fédérale 3.
Ce club a énormément progressé et il ne ressemble pas vraiment à celui que j’ai connu d’un point de vue structurel tout en ayant gardé sa culture, son identité, la fameuse REC attitude. Les choses se sont faites intelligemment, tant sur l’organisation que sur le sujet des infrastructures.
Tu es un aussi un fier représentant du rugby breton.
Depuis 15 ans, le rugby breton s’est fait sa place et tout laisse à penser que ça va continuer. Le ballon ovale se construit autour d’une identité forte et quoi de mieux que la culture bretonne pour l’accompagner ? La Bretagne est une belle vitrine pour le rugby et inversement.
Ton discours en finale de Fédérale 1 est dans toutes les mémoires, tu prépares celui de Niort ?
Non du tout, je connais l’équipe et les leviers de motivation, je m’occuperai de bricoler quelques phrases en temps voulu (rires).
Quels mots pourrais-tu adresser à cet Alexandre qui commençait le rugby en 2010, à 19 ans ?
Je lui dirais de profiter de tous les moments car cela passe très vite, de ne pas changer son approche du sport et de construire son histoire à l’endroit où il se sent le mieux, en Bretagne naturellement.
- Finale de Nationale 2
- Niort RC / Rennes EC
- 4 mai
- 15 heures
- Stade Tonnellé, Tours