Pour Kevin, les matchs se jouent davantage à l’extérieur : l’intérêt du petit garçon à la curiosité insatiable n’est pas vraiment porté sur les cours et les devoirs, mais plutôt vers l’horizon. « J’étais un enfant de dehors, plutôt du genre cascadeur, mais sans la réussite. J’ai passé pas mal de temps chez le médecin », explique-t-il en riant. L’éducation parentale est portée sur l’humain, la famille, mais aussi la culture et l’histoire. Et la musique résonne souvent, option Daniel Balavoine côté maternel et Renaud, Brassens, Brel du côté paternel.
Le goût du rugby
Le goût du rugby arrive un peu plus tard… avec un papa qui a arpenté les terrains de Périgueux, pendant son service militaire. « Quand on jouait dans la cour avec les voisins, mon père mettait la télé assez fort pour que l’on entende les commentaires de Roger Couderc et Pierre Albaladejo. Cela cassait les oreilles de maman ! Et puis, en grandissant, nous nous sommes rapprochés du salon et on s’est délecté à regarder les matchs en famille, notamment en 1996, lors la première grande coupe d’Europe et le tournoi des 5 nations. »
En 2000, le club de rugby de Bain-de-Bretagne ouvre ses portes. Kevin a 13 ans. Il s’inscrit. « Je jouais au foot comme tous les enfants, mais je ne m’y retrouvais plus trop… J’étais défenseur, je ne touchais pas vraiment de ballon. Et au foot, même si j’aime ce sport, on est cantonné à un seul rôle. Pour moi, il n’y a pas assez de liberté. » Alors qu’au rugby… « peu importe le poste, tout le monde a la même ligne directrice. Tu attaques, tu défends, tout le monde est concerné ! Une sensation de liberté incroyable ! »
Les premiers souvenirs
Les premiers souvenirs sont piquants… « Les vieux maillots grattaient ! Mais la découverte de ce nouveau sport et le sentiment de partage m’ont tout de suite plu. » L’équipe rassemble Bain-de-Bretagne et Bruz. « Je m’épanouis, même si au niveau physique, ce n’était pas gagné, j’ai plutôt hérité de la taille de ma mère… » Un an après, il passe à l’avant. Puis se consacre un peu à l’arbitrage. Un nouveau rassemblement départemental comprend le REC. « Maman faisait la route tous les mercredis et m’attendait au Crubillé. » Puis, c’est le passage en junior, avec le rassemblement Redon-Bruz pendant deux ans. Viennent ensuite les années seniors, retour à Bain-de-Bretagne. Il commence également à entraîner les moins de 7 ans à l’école de rugby du BBR. Mais au début de la deuxième saison senior, il se rompt les ligaments croisés. « On me propose alors, à 18 ans ¾, d’entraîner l’équipe. On finit champions de Bretagne, premier titre pour le club. »
Côté scolaire, « c’est pire que le football ! Après le collège, que j’ai poursuivi à mon rythme… je suis parti au lycée mécanique automobile à Jean Jaurès, où j’ai obtenu un BEP, un CAP et un Bac Pro, que j’ai validé avec un 9/20 aux épreuves professionnelles. J’étais manifestement fait pour ce métier ! » Il travaille tout de même un peu dans ce domaine, puis dans le BTP. En 2009, il suit une formation professionnelle où il obtient un BP JEPS activités physiques pour tous et un BP JEPS sports collectifs option rugby. « Mon projet initial était la création d’un poste à Bain-de-Bretagne, mais je rencontre les dirigeants du Stade Rennais ».
C’est ainsi que le 15 octobre 2009, Kevin signe son premier contrat dans le domaine sportif. Il y restera six ans où est notamment fondé le pôle espoir et où se développe le rugby universitaire. Côté rugby masculin, celui-ci change de profil : « avec le travail qu’effectuait Guillaume Comméat au REC, l’université avait la chance d’accueillir des jeunes préparés à l’entraînement. Dans les années qui ont suivi, une vague de jeunes joueurs et joueuses est revenue en STAPS. Ils ont ainsi construit le renouveau du club, avec une démarche d’exigence et d’entraînements. Il y a eu une convergence d’envies, de compréhension que le talent ne suffisait plus. S’est installée une rigueur plus professionnelle, mais sans forcément les moyens ».
Il continue de jouer au Rheu, mais se blesse aux cervicales. Fin de carrière obligatoire. Il entraîne ensuite la réserve, qui finit vice-championne de France. L’année qui suit, le Stade Rennais lui confie l’équipe première avec Sandrine Agricole. Parallèlement, le projet rugby autour du REC se construit. Yann Moison, manager sportif du club avec qui il travaille sur le projet universitaire, le sollicite. Le REC sort d’une saison difficile en Fédérale 2, mais l’énergie est là. Mission : relancer la REC Académie (future SKOL), entraîner les senior avec Yann et piloter le pôle jeunes. Nous sommes en 2016.
9 saisons. Deux années de Fédérale 2 (deux phases finales et une montée en 2018), deux ans en Fédérale 1 (phases finales), puis une année de Covid. Quand le championnat reprend, Kevin a validé son Brevet d’État supérieur. S’ensuivent quatre matchs gagnés et le Covid revient, pour mieux repartir. 2022, c’est l’année de la montée en Nationale, et du titre de champion de France « le jour des 103 ans de mon grand-père ». Moments forts.
Quand on lui demande ce qu’il aime dans son métier, la réponse fuse : « Tout ! Être au contact des joueurs au quotidien, bien les connaître, gérer leurs réussites, leurs échecs, sportifs, mais aussi personnels. J’aime l’entraînement, chercher les moyens pour qu’ils s’éclatent dans leur sport. J’aime la compétition, mais l’adversité surtout. Le fait que les gens me regardent toujours de haut me stimule ! », confie-t-il d’un œil malicieux.
Quand on l’interroge sur ses qualités, il répond : « investi, passionné, curieux, en perpétuelle remise en question. » Côté défauts : « excessif, passionné, râleur un peu, tête de mule beaucoup… » Breton quoi ! Et les ambitions pour 2024 sont claires : « On veut y retourner ! Clairement. La Nationale 1 est un super niveau de compétition ! Et si l’on a envie que nos jeunes travaillent dans de meilleures conditions, il faut que nous fassions bouger les lignes. » Et comment l’atteindre ? « En gagnant des matchs, mais sans se dénaturer. En restant humbles et conscients de ce que nous sommes. En jouant ce qu’est le REC, c’est-à-dire l’esprit libéré. »
Quand il n’entraîne pas l’équipe senior, le manager occupe ses temps libres à regarder d’autres sports, écouter de la musique, Renaud encore, du rock beaucoup, aimant « les paroliers et les grosses guitares ». Il aime aussi cuisiner, même s’il avoue « ne pas maîtriser les épices ». Mais est-ce bien étonnant pour un passionné ? Et bien sûr, être en famille, auprès de sa femme Lucie et de ses deux filles Romane, 5 ans et Élyne, 2 ans et demi. Et quand on lui demande comment il se voit dans dix ans : « les cheveux gris, c’est fait… je dirais dans une sorte de continuité, avec une vie de famille épanouie, un beau projet, qui aurait grandi. Et de me sentir utile. » Et s’il a un rêve ? « Soulever le bouclier de Brennus bien sûr ! »
Manière de manager en trois mots ?
« Relationnelle, compréhensive et passionnelle ! »
Animal totem : le tigre
Premier club : Bain-de-Bretagne
Fond d’écran de téléphone : ma grande qui protège sa petite sœur
Passe-temps en dehors du rugby : musique, cuisine et famille
Chanson pour le stade : « Le triomphe des sonneurs » : « j’ai assisté à la grande parade du Festival interceltique en 2022. Quand tous les sonneurs du bagad de Lann-Bihoué ont défilé pour les 70 ans, c’était incroyable ! Mon plus beau souvenir côté culture que j’ai partagé avec Mikaele Tuugahala »