-par Jean
50e minute du derby Rennes-Nantes. Les visiteurs viennent tout juste de prendre les commandes au score grâce à un essai de pénalité. Sur le renvoi, les Noir et Blanc investissent le camp adverse, l’arbitre annonce un avantage, Morne Vletter monte une longue chandelle à l’entrée des 22 adverses. Laquelle redescend dans l’en-but des Éléphants. Malgré deux défenseurs à la réception, Enzo Salvai est le plus prompt pour récupérer le ballon et marquer. L’arrière fête sa cinquième titularisation de la saison par son troisième essai, et celui-ci vaut très cher dans la course à la victoire, tant attendue par les Rennais.
Salvai vit sa deuxième saison au REC et il faut remonter à plus de 15 000 kilomètres de la Bretagne, en Nouvelle-Calédonie, pour voir où son talent a pris racines. ‘’J’ai commencé au Stade Calédonien avant de rejoindre l’Olympique de Nouméa. On faisait surtout du sept et même quand on passait à quinze, le sept avait une part importante sur nos saisons. J’ai ainsi pu développer des qualités d’évitement et puis j’ai toujours été moins solide que les autres (rires) alors on s’adapte rapidement, on s’appuie sur la vitesse’’. Déjà, l’arrière, alors coéquipier de Mathieu Jalibert (NDLR : ouvreur de l’UBB) a des qualités et s’imposer en Métropole devient un objectif. ‘’L’Olympique a un partenariat avec l’Aviron Bayonnais. Un joueur du club, Maka Polutele, était déjà parti là-bas avant moi. Je suis allé quelques mois en Nouvelle-Zélande puis j’ai rejoint Bayonne’’.
Face à Belleau et Ntamack
Enzo intègre le collectif Espoirs, lequel évolue en Poule Élite et doit se cogner chaque week-end les meilleurs de sa catégorie. Toulouse, Clermont, Narbonne… tant d’équipes qui se succèdent au Stade Belascain. ‘’Ça a été un choc c’est clair. Déjà, chez moi, tout le monde se connait et en plus il fait toujours chaud ! C’était franchement différent. Je débarque dans un climat professionnel, de concurrence… Et je passe de deux entraînements par semaine à quasiment deux par jour. Ça t’apprend la rigueur’’. Avec l’Aviron, Salvai croise notamment Anthony Belleau et Romain Ntamack, devenus internationaux depuis, ou encore Alexis François, qui évolue encore à Narbonne. Enzo appuie, ‘’ça allait vite rugbystiquement, la marche était importante par rapport à ce que j’avais pu connaître avant mais ça m’a fait progresser rapidement’’.
Salvai évolue deux saisons chez les pensionnaires de Jean-Dauger. Lors de la seconde, il ne voit le terrain que depuis les tribunes, en convalescence, blessé longuement à l’épaule. ‘’J’étais perdu évidemment, je ne savais pas vraiment où aller après Bayonne et Vincent Bréhonnet qui est un ami de mon père m’a parlé du projet de Rennes. Le club jouait alors la montée en Fédérale 1’’. Le Calédonien débarque en Bretagne et joue avec les Espoirs Fédéraux tout en s’entraînant avec le groupe Fédérale 1 avec lequel il évolue deux fois en compétition la saison passée (contre Saint-Médard et à Cognac). ‘’Le championnat Espoirs Fédéraux est intéressant, j’ai pu retrouver la compétition après ma blessure. On affronte de bons joueurs et Thomas (Mottin) et Thierry (Aussillous) m’ont fait progresser, notamment sur mon attitude’’. Car longtemps Enzo cache sous le tapis de ses ‘’breaks’’ de la ligne d’avantage, une certaine impulsivité. ‘’J’ai toujours été un peu fou-fou, impulsif. Thierry a notamment su me calmer. Je me rappelle d’un match à Niort, on menait de trois points à cinq minutes de la fin et j’ai tenté un coup de pied par-dessus dans nos 22, on en rigole maintenant mais à ce moment-là personne ne riait, et surtout pas Thierry… Il faut tout jouer à fond mais sans faire n’importe quoi, la nuance est là’’.
Air Salvai
En Espoirs, Salvai est une arme importante du collectif, sa capacité à faire des différences est remarquée et lui permet d’intégrer pleinement l’équipe fanion cette saison. Bombardé contre Cognac, il démarre ensuite à Niort et marque son premier essai de la saison. Il réitère à Bergerac : parfaitement décalé par une passe au contact de Wenger, il file dans l’en-but au terme d’une course de trente-cinq mètres. Costaud. Son essai face à Nantes a récompensé les efforts de son équipe et sa performance, aboutie et maîtrisée. ‘’Je me sens vraiment privilégié de jouer en Fédérale 1, les coachs m’offrent cela et j’en suis reconnaissant. J’espère que Nantes sera un déclic, il fallait savourer la victoire devant un tel public, j’en avais presque les larmes aux yeux à la fin du match’’.
Salvai lit souvent le jeu avec succès et sa vitesse lui permet fréquemment d’être placé dans les intervalles. Vincent Bréhonnet, son mentor peut-être, docteur és skills et lignes arrières, le voit comme un ‘’très bon contre-attaquant. Enzo apprécie les espaces et est très fort sur le jeu aérien. Il a une vraie appétence pour cela et ça lui permet de se démarquer. Dès qu’on lui a fait confiance dernièrement, il a fait de belles sorties’’. Désormais membre à part entière d’un collectif qui l’a bien intégré (‘’Alexandre Gueroult m’a pris sous son aile. Romu François, Romain Laboudigue, Sébastien Magnan, Arnaud Le Berre, Mathieu Brignonen… Les arrières m’ont fait sentir comme un des leurs aussi et c’est vraiment appréciable"), Salvai doit s’inscrire dans la durée en Fédérale 1. À toute allure et avec deux objectifs en tête : ‘’je veux être fier de ce que j’accomplis et surtout que mon père, mon frère, mes proches le soient. Ils me suivent et ça me pousse’’.
